"Les Années douces" par Taniguchi et Kawakami
D’ailleurs, les éditions Casterman ne s’y sont pas trompé en proposant ce premier tome des « Années douces » dans leur collection « Écritures » (qui accueille nombre d’excellents romans graphiques, sans barrières géographiques ou stylistiques), avec un sens de lecture occidental qui ne rebutera pas les lecteurs peu habitués à une forme de lecture « à l’envers ».
Dans l’histoire touchante de cette rencontre de deux solitudes (une trentenaire célibataire et un élégant veuf qui a presque le double de son âge), on retrouve tous les atouts des autres chefs-d’œuvre du maître : trait d’une grande finesse, sens aigu de la pose des trames, subtil équilibre de la mise en page, similitude avec une certaine forme de littérature romanesque qui prend son temps pour nous faire partager les petits bonheurs simples de la vie ; Taniguchi s’attardant ici, particulièrement, sur celui des promenades et des découvertes qu’elles occasionnent, mais aussi sur celui du « bien manger », comme il l’avait déjà fait dans « Le Gourmet solitaire », par exemple.
Même s’il y reprend certains de ses thèmes de prédilection, cette adaptation d’un célèbre roman de Hiromi Kawakami (publié en France chez Picquier), où insensiblement, au fil des rencontres, les liens se resserrent entre cette jeune femme et son ancien professeur de japonais qu’elle a retrouvé par hasard, lui permet de sortir un peu de son schéma narratif habituel. Et c’est avec délicatesse et pertinence qu’il nous emporte, doucement mais sûrement, dans cette complicité sereine qui s’installe, malgré la différence d’âge : l’histoire d’une amitié amoureuse qui va ravir les fans du mangaka, mais qui est aussi un bon moyen de découvrir son univers pour tous ceux qui ne le connaissent pas encore !
Gilles RATIER
? Les Années douces ? par Jirô Taniguchi et Hiromi Kawakami
Éditions Casterman (15 Euro)